« Les chances de guérison ont nettement augmenté ces dernières années », déclare la professeure Cornelia Leo. Responsable du centre du sein interdisciplinaire de l’Hôpital cantonal de Baden (AG), elle travaille comme médecin depuis plus de vingt ans. Durant cette période, le traitement a énormément progressé : « Je suis heureuse que nous puissions apporter notre pierre à la lutte contre le cancer du sein en contribuant à la recherche clinique. » Plus encore que la recherche, les relations établies au fil des ans avec ses patientes lui tiennent à cœur: « J’apprécie beaucoup la confiance que les femmes nous témoignent et je suis contente de pouvoir les accompagner dans cette phase de vie délicate. » Pour elle, annoncer le diagnostic est toujours difficile: « C’est chaque fois un nouveau défi, on ne s’y habitue jamais. » Heureusement, la grande majorité des patientes peuvent être guéries aujourd’hui, ajoute-t-elle. « Je garde cela en tête et je veille à le dire aux femmes lors du premier entretien. » Pour beaucoup, le diagnostic est un coup de tonnerre dans le ciel bleu; leur univers s’écroule. Dans pareil cas, la psycho-oncologie peut apporter un soutien supplémentaire. Mais certaines femmes prennent la nouvelle avec calme; elles s’y attendaient. Cornelia Leo est particulièrement touchée lorsque la patiente est très jeune ou enceinte. « La future mère se réjouit d’avoir un bébé, et voilà qu’elle apprend qu’elle a un cancer du sein et qu’elle doit subir une chimiothérapie », dit-elle. Pour sa part, elle se ressource auprès de ses proches: « J’ai deux filles merveilleuses et un mari qui me soutient. Je savoure notre vie de famille en étant consciente de ma chance. »
Craintes les plus fréquentes
« La plupart des femmes redoutent la chimiothérapie », estime la spécialiste. Elles ne savent pas comment elles supporteront le traitement, qui s’étire sur plusieurs mois et peut être épuisant. Les femmes n’abordent également pas toutes la perte de leurs cheveux de la même manière.
Aujourd’hui encore, beaucoup considèrent les seins comme un signe essentiel de féminité. « Nous accompagnons aussi nos patientes lorsqu’elles doivent com- poser avec une nouvelle image corporelle. Environ 70 % des femmes concernées peuvent bénéficier d’une opé- ration conservatrice. Pour les 30 % restants, l’ablation du sein est nécessaire. » À l’heure actuelle, le sein est généralement reconstruit après la mastectomie, qui consiste à enlever la glande mammaire et le tissu. Quelques femmes jugent toutefois que ce n’est pas si important, déclare la médecin. Il est essentiel d’informer chaque femme avec tact pour qu’elle puisse prendre sa décision. Souhaite-t-elle une reconstruction avec de la silicone, si possible avec du tissu prélevé sur son propre corps, ou une prothèse à glisser dans le soutien-gorge? En outre, le sein reconstruit ne procure pas les mêmes sensations : « La femme doit d’abord se familiariser avec son nouveau sein. Cela demande du temps. » La sexualité joue aussi un rôle : comment est-ce que je me vois ? Et mon partenaire ? À cela s’ajoutent des changements hormonaux lorsqu’un traitement antihormonal est prescrit, complète la spécialiste.
Causes et sentiment de culpabilité
Après le diagnostic, la première question qui se pose est souvent celle du pourquoi: « La plupart des femmes souhaitent trouver une cause concrète. » La chercheuse souligne cependant que le cancer du sein relève du hasard dans 70 à 80 % des cas. La maladie est liée à des influences hormonales; les hormones féminines présentes chez toutes les femmes ont donc une incidence sur le risque. L’âge entre également en ligne de compte ; le cancer du sein est plus répandu après 50 ans. Mais la plupart du temps, il n’y a pas un seul et unique facteur en cause. Selon la spécialiste, certaines femmes ont « fait tout juste »: elles se sont nourries sainement, ont fait du sport, ont allaité leur bébé, et elles développent un can- cer du sein malgré tout. Les femmes n’y peuvent rien. Cornelia Leo essaie de les amener à ne pas culpabiliser. « Le cancer du sein est hélas fréquent : une femme sur huit reçoit ce diagnostic au cours de sa vie, ce que beaucoup de gens ignorent. »